Chapitre 3
1 L’an quinzième du règne de César Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode, tétrarque de Galilée, Philippe, son frère, tétrarque d’Iturée et du pays de Trachonite, et Lysanias tétrarque d’Abylène ;
Note : Luc 3, 1 : L’an quinzième du règne de César Tibère. Claude Tibère Néron, fils de Tibère Claude Néron et de Livia Drusilla, second empereur romain, était né à Rome l’an 42 avant notre ère. Sa mère Livia épousa l’an 38 l’empereur Auguste qui l’adopta, l’an 4 de notre ère, après lui avoir fait épouser l’an 11 avant Jésus-Christ sa fille Julie. Tibère fut associé en l’an 13 de notre ère au gouvernement de l’empire et chargé de l’administration des provinces. L’année suivante, en l’an 14, Auguste étant mort, son fils adoptif se trouva seul maître de l’empire. Il avait alors 55 ans. Il mourut en 37, à l’âge de 78 ans. Pendant son règne, il donna deux procurateurs à la Palestine, Valerius Gratus, qui garda sa charge onze ans (15-26 de notre ère) et Ponce Pilate, qui fut procurateur pendant dix ans (26-36). La 15e année de Tibère va du 19 août de l’an 28 jusqu’à la même époque de l’an 29 après Jésus-Christ. ― Ponce Pilate. Voir Matthieu, 27, 2. ― Hérode, tétrarque de Galilée. Hérode Antipas. Voir Matthieu, 14, 1 . ― Philippe le tétrarque ou Hérode Philippe était fils d’Hérode-le-Grand par sa cinquième femme, Cléopâtre de Jérusalem. C’est le seul des fils de ce roi qui n’ait pas laissé la réputation de mauvais prince. Il épousa à un âge assez avancé Salomé, fille d’Hérodiade, la danseuse qui demanda la tête de saint Jean-Baptiste. Philippe était tétrarque d’Iturée et du pays de Trachonite. L’Iturée, région montagneuse, conquise par le roi Aristobule environ un siècle avant Jésus-Christ, était au nord-est de la Palestine et à l’ouest de Damas. Ses habitants étaient célèbres par leurs brigandages et par leur habileté à tirer de l’arc. La Trachonite, l’ancien Argob, le Ledja actuel, était également habitée par des pillards qui demeuraient sous des tentes. L’empereur Auguste donna ce pays à Hérode le Grand, l’an 23 avant notre ère, pour qu’il le purgeât du brigandage. Saint Luc entend par Trachonite tout le pays situé au sud de l’Antiliban, à l’est du haut Jourdain et du lac de Tibériade jusqu’aux montagnes des Druses. Philippe gouverna ce pays 37 ans ; il embellit et agrandit Césarée de Philippe, qui reçut de lui ce surnom, et Bethsaïde-Julias et il mourut sans postérité l’an 34 de notre ère. ― Lysanias n’est guère connu que de nom. C’était probablement le descendant d’un autre Lysanias, prince de Chalcis du Liban, que Cléopâtre avait fait périr insidieusement en 35 avant Jésus-Christ. ― Abylène était le pays qui tirait son nom de la ville d’Abila. Il était situé entre le Liban et l’Hermon, au nord-ouest de Damas, à dix-huit milles romains de cette dernière ville et à trente-sept milles d’Héliopolis.
2 Sous les grands prêtres Anne et Caïphe, la parole du Seigneur se fit entendre à Jean, fils de Zacharie, dans le désert.
Note : Luc 3, 2 : Voir Actes des Apôtres, 4, 6. ― Sous les grands prêtres Anne et Caïphe. Anne, fils de Seth, appelé par Josèphe Ananus, fut promu grand prêtre par Quirinus, gouverneur de Syrie, l’an 7 de notre ère. Au commencement du règne de Tibère, en l’an 14 (15 ? ), il fut déposé par Valerius Gratus, procurateur de Judée et remplacé par Ismael, fils de Phabi. Bientôt après, Eléazar, fils d’Anne, reçut le souverain pontificat, qu’il dut céder l’année suivante à Simon, fils de Camith. Ce dernier fut remplacé par le gendre d’Anne, Joseph Caïphe, qui conserva cette dignité de l’an 27 ou 28 à l’an 36 ou 37. Anne vécut longtemps et cinq de ses fils furent tour à tour grands prêtres. Les Evangélistes l’ont nommé avec Caïphe, soit parce qu’il était son sagan ou vicaire, comme quelques-uns l’ont pensé, soit qu’il fut encore alors président du sanhédrin ou bien qu’ayant exercé les fonctions du souverain pontificat, il en portât encore le titre par honneur. Il devait, en tout cas, jouir d’une grande influence à Jérusalem, et en particulier auprès de Caïphe, son gendre. ― Sur Caïphe, voir Matthieu, 26, 3. ― Sur Jean, fils de Zacharie, voit Matthieu, 3, 1. ― Dans le désert de Judée. Voir Matthieu, 3, 1.
3 Et il vint dans toute la région du Jourdain, prêchant le baptême de pénitence pour la rémission des péchés.
Note : Luc 3, 3 : Voir Matthieu, 3, 1 ; Marc, 1, 4. ― Toute la région du Jourdain, le Ghôr actuel.
4 Ainsi qu’il est écrit au livre des paroles du prophète Isaïe : Voix de quelqu’un qui crie dans le désert : Préparez la voie du Seigneur, faites droits ses sentiers :
Note : Luc 3, 4 : Voir Isaïe, 40, 3 ; Jean, 1, 23. ― Dans le désert de Judée.
5 Toute vallée sera comblée, et toute montagne et toute colline seront abaissées, les chemins tortueux deviendront droits, et les raboteux, unis ;
Note : Luc 3, 5 : La rédemption fait disparaître l’inégalité entre les hommes (saint Jérôme).
6 Et toute chair verra le salut de Dieu.
Note : Luc 3, 6 : Toute chair. Voir Matthieu, 24, 22.
7 Ainsi il disait à ceux qui accouraient en foule pour être baptisés par lui : Race de vipères, qui vous a montré à fuir la colère à venir?
Note : Luc 3, 7 : Voir Matthieu, 3, 7 ; 23, 33.
8 Faites donc de dignes fruits de pénitence, et ne commencez pas par dire : Nous avons pour père Abraham. Car je vous dis que de ces pierres mêmes Dieu peut susciter des enfants à Abraham. 9 Déjà la cognée a été mise à la racine des arbres. Tout arbre donc qui ne produit pas de bon fruit sera coupé et jeté au feu. 10 Et la foule l’interrogeait, disant : Que ferons-nous donc? 11 Et répondant, il leur disait : Que celui qui a deux tuniques en donne une à celui qui n’en a point, et que celui qui a de quoi manger fasse de même.
Note : Luc 3, 11 : Voir Jacques, 2, 15 ; 1 Jean, 3, 17.
12 Des publicains vinrent aussi pour être baptisés, et lui demandèrent : Maître, que ferons-nous? 13 Et il leur répondit : Ne faites rien de plus que ce qui vous a été prescrit. 14 Et des soldats aussi l’interrogeaient, disant : Et nous, que ferons-nous ? Et il leur dit : N’usez de violence ni de fraude envers personne, et contentez-vous de votre paye.
Note : Luc 3, 14 : Ni de fraude. Le mot du texte, qui signifie proprement calomnie, s’emploie assez souvent dans la Bible pour fraude, injustice.
15 Or le peuple croyait et tous pensaient en leurs coeurs que Jean pourrait bien être le Christ. 16 Jean répondit, disant à tous : Pour moi, je vous baptise dans l’eau; mais viendra un plus puissant que moi, de la chaussure de qui je ne suis pas digne de délier la courroie : lui vous baptisera dans l’Esprit-Saint et le feu ;
Note : Luc 3, 16 : Voir Matthieu, 3, 11 ; Marc, 1, 8 ; Jean, 1, 26 ; Actes des Apôtres, 1, 5 ; 11, 16 ; 19, 4. ― La chaussure, les sandales. Voir Marc, 6, 9.
17 Son van est en sa main, et il nettoiera son aire, puis il rassemblera le froment dans son grenier, et brûlera la paille dans un feu qui ne peut s’éteindre.
Note : Luc 3, 17 : Voir Matthieu, 3, 12.
18 C’est ainsi qu’en lui apprenant beaucoup d’autres choses, il évangélisait le peuple. 19 Mais comme il reprenait Hérode le tétrarque, au sujet d’Hérodiade, femme de son frère, et à cause de tous les maux qu’il avait faits,
Note : Luc 3, 19 : Voir Matthieu, 14, 4 ; Marc, 6, 17. ― Hérode le tétrarque Antipas. Voir Matthieu, 14, 1. ― Hérodiade, voir Matthieu, 14, 3. ― Femme de son frère, voir Matthieu, 14, 3.
20 Hérode ajouta encore celui-ci à tous les autres, il fit mettre Jean en prison.
21 Or il arriva que, comme tout le peuple recevait le baptême, et que Jésus ayant été baptisé, priait, le ciel s’ouvrit;
Note : Luc 3, 21 : Voir Matthieu, 3, 16 ; Marc, 1, 10 ; Jean, 1, 32.
22 Et l’Esprit-Saint descendit sur lui sous la forme sensible d’une colombe ; et une voix vint du ciel : Vous êtes mon fils bien-aimé; c’est en vous que j’ai mis mes complaisances.
Note : Luc 3, 22 : Voir Matthieu, 3, 17 ; 17, 5 ; Luc, 9, 35 ; 2 Pierre, 1, 17.
23 Or Jésus avait, quand il commença son ministère, environ trente ans, étant, comme l’on croyait, fils de Joseph, qui le fut d’Héli, qui le fut de Mathat.
Note : Luc 3, 23 : Suivant plusieurs interprètes, saint Joseph, qui, selon la nature, était fils de Jacob, était, selon la loi, fils d’Héli. Car Héli et Jacob étaient frères utérins ; et Héli, l’ainé, étant mort sans postérité, Jacob, d’après la loi, épousa sa veuve et par suite de ce mariage, son fils Joseph fut réputé fils d’Héli selon la loi. D’autres disent que Joseph, fils de Jacob par nature, l’était d’Héli par alliance, ayant épousé Marie, qui en était la fille. ― Sur la double généalogie de Notre-Seigneur, voir la note 26 à la fin du volume.
24 Qui le fut de Lévi, qui le fut de Melchi, qui le fut de Janné, qui le fut de Joseph, 25 Qui le fut de Mathathias, qui le fut d’Amos , qui le fut de Nahum, qui le fut de Hesli, qui le fut de Naggé, 26 Qui le fut de Mahath, qui le fut de Mathathias, qui le fut de Séméi, qui le fut de Joseph, qui le fut de Juda, 27 Qui le fut de Joanna, qui le fut de Réza, qui le fut de Zorobabel, qui le fut de Salathiel, qui le fut de Néri, 28 Qui le fut de Melchi, qui le fut d’Addi, qui le fut de Cosan, qui le fut d’Elmadan, qui le fut de Her, 29 Qui le fut de Jésu, qui le fut d’Eliézer, qui le fut de Jorim, qui le fut de Mathat, qui le fut de Lévi, 30 Qui le fut de Siméon, qui le fut de Juda, qui le fut de Joseph, qui le fut de Jona, qui le fut d’Eliakim, 31 Qui le fut de Méléa, qui le fut de Menna, qui le fut de Mathatha, qui le fut de Nathan, qui le fut de David, 32 Qui le fut de Jessé, qui le fut d’Obed, qui le fut de Booz, qui le fut de Salmon, qui le fut de Naasson, 33 Qui le fut d’Aminadab, qui le fut d’Aram, qui le fut d’Esron, qui le fut de Pharès, qui le fut de Juda, 34 Qui le fut de Jacob, qui le fut d’Isaac, qui le fut d’Abraham, qui le fut de Tharé, qui le fut de Nachor, 35 Qui le fut de Sarug, qui le fut de Ragaü, qui le fut de Phaleg, qui le fut d’Héber, qui le fut de Salé, 36 Qui le fut de Caïnan, qui le fut d’Arphaxad, qui le fut de Sem, qui le fut de Noé, qui le fut de Lamech, 37 Qui le fut de Mathusalé, qui le fut d’Hénoch, qui le fut de Jared, qui le fut de Malaléel, qui le fut de Caïnan, 38 Qui le fut d’Hénos, qui le fut de Seth, qui le fut d’Adam, qui fut de Dieu.
Note : Luc 3, 38 : Qui fut de Dieu. « Ce simple mot, jeté là sans commentaire et sans réflexion, pour raconter la création, l’origine, la nature, les fins et le mystère de l’homme, est de la plus grande sublimité. » (E. LEFRANC. )