Chapitre 18
1 Parole qui fut adressée à Jérémie par le Seigneur, disant :
Note : Jr. 18, 1-23 : IIe partie : Confirmation de la réprobation d’Israël, chapitres 18 et 19. ― Israël rejeté comme un vase de terre brisé, chapitres 18 et 19. ― La seconde partie renferme le récit de deux actions symboliques qui montrent que la réprobation d’Israël est irrévocable. ― 1° Dieu a résolu de punir Israël ; cependant tout n’est pas encore perdu et il peut revenir sur sa décision : le potier que va visiter Jérémie refait sous ses yeux le vase d’argile qui s’est rompu entre ses mains ; si Juda fait pénitence, le Seigneur lui pardonnera, chapitre 18, versets 1 à 11. ― Juda refuse de se convertir, versets 12 à 15 ; la vengeance est donc inévitable, versets 16 et 17 ; les coupables en veulent même aux jours du Prophète, verset 18, de sorte que, à son tour, il demande leur châtiment, versets 19 à 23. ― 2° Le lieu de la scène change. Le Prophète se rend dans la vallée de Ben Hinnom ou Topheth, au sud de Jérusalem, là où les idolâtres avaient commis un de leurs plus grands crimes, celui des sacrifices d’enfants, brûlés en l’honneur de Moloch ou de Baal. Il rappelle d’abord les crimes qui se sont commis en ce lieu, et les malheurs qui en seront la punition, chapitre 19, versets 1 à 9 ; puis, en signe de la désolation qui doit frapper d’une manière définitive Jérusalem, véritable Topheth, il brise un vase de terre qui ne peut plus être réparé, versets 10 à 13. Après cela, il se rend dans le parvis du temple et y répète les mêmes menaces prophétiques, versets 14 et 15.
Note : Jr. 18, 1 : Disant. Voir sur ce mot, Jérémie, 1, 4.
2 Lève-toi, et descends dans la maison du potier, et là tu entendras mes paroles.
Note : Jr. 18, 2 : Du potier. L’article déterminatif qui est dans l’hébreu et qui a été fidèlement reproduit dans les Septante, indique si évidemment un potier connu de Jérémie d’une manière ou d’une autre, et que la traduction ordinaire, d’un potier, est fautive.
3 Et je descendis dans la maison du potier, et voilà qu’il faisait lui-même un ouvrage sur sa roue.
Note : Jr. 18, 3 : Sur sa roue ; dans l’hébreu, sur les ou ses deux pierres ; l’article étant mis pour le pronom, comme il arrive assez souvent. Il paraît constaté que les potiers dans l’Orient travaillaient sur une machine composée de deux roues de pierre, dont l’une était grande et en soutenait une plus petite sur laquelle était posée l’argile.
4 Et le vase d’argile qu’il faisait se brisa dans ses mains: et revenant, il en fit un autre vase, comme il avait plu à ses yeux de le faire.
Note : Jr. 18, 4 : Revenant ou retournant (conversus) il en fit ; hébraïsme, pour il en refit ; il en fit un nouveau.
5 Et la parole du Seigneur me fut adressée, disant :6 Est-ce que comme ce potier a fait à son argile, je ne pourrai pas vous faire, maison d’Israël, dit le Seigneur? Voici que, comme l’argile est dans la main du potier, ainsi vous êtes dans ma main, maison d’Israël.
Note : Jr. 18, 6 : Voir Isaïe, 45, 9 ; Romains, 9, 20.
7 Soudain je parlerai contre une nation, et contre un royaume, afin de l’extirper et de le détruire, et de le perdre entièrement.
Note : Jr. 18, 7 : Voir Jérémie, 1, 10. ― Le (illud) ; ce pronom, qui n’existe ni dans l’hébreu ni dans le grec, se rapporte grammaticalement à royaume (regnum), mais dans le sens logique, il se rapporte également au mot précédent nation.
8 Si cette nation se repent du mal que je lui ai reproché, je me repentirai moi aussi du mal que j’ai résolu de lui faire.
Note : Jr. 18, 8 : Je me repentirai. Dieu parlant aux hommes emprunte ici leur langage. Il ne peut nullement se repentir, mais il peut paraître se repentir, quand il s’abstient d’accomplir le mal dont il avait menacé. Dieu, suivant la remarque de saint Augustin, change ses oeuvres, mais ne change pas ses desseins ; or c’est en changeant ses oeuvres qu’il paraît changer ses desseins.
9 Soudain aussi je parlerai d’une nation et d’un royaume, afin de l’édifier et de l’affermir.
Note : Jr. 18, 9 : Le (illud) ; même observation qu’au verset 7.
10 Et si cette nation fait le mal à mes yeux et n’écoute point ma voix, moi aussi je me repentirai du bien que j’ai dit que je lui ferais.
Note : Jr. 18, 10 : Cette nation ; est évidemment, d’après le texte original, le sujet grammatical, quoique sous-entendu, des verbes fait et écoute ; mais le sujet logique comprend de plus le mot royaume, exprimé au verset précédent. ― Lui ; dans l’hébreu se rapporte à nation ; les Septante portent à eux ; ce qui comprend nation et royaume, et rend exactement le sens.
11 Maintenant donc, dis à l’homme de Juda et aux habitants de Jérusalem, en disant : Voici ce que dit le Seigneur : Voilà que moi je prépare contre vous un malheur, et que je forme contre vous une résolution : que chacun revienne de sa voie mauvaise, et dirigez vos voies et vos oeuvres.
Note : Jr. 18, 11 : Voir 4 Rois, 17, 13 ; Jérémie, 25, 5 ; 35, 15 ; Jean, 3, 9 (a supprimer).
12 Et ils ont dit : Nous avons désespéré; nous suivrons nos pensées, chacun de nous accomplira la dépravation de son coeur mauvais.
13 C’est pourquoi, voici ce que dit le Seigneur : Interrogez les nations : Qui a jamais ouï des choses horribles, telles que celles qu’a commises à l’excès la vierge d’Israël? 14 Est-ce que la neige du Liban abandonnera le sentier de la campagne? ou peuvent-elles être détruites, des eaux jaillissantes, fraîches et coulantes?
Note : Jr. 18, 14 : Le sentier de la campagne est le mont Liban lui-même, sur les cimes duquel la neige ne fond jamais complètement.
15 Parce que mon peuple m’a oublié, sans en retirer aucun fruit, faisant des libations et se heurtant dans leurs voies, dans les sentiers du siècle, afin d’y marcher dans un chemin non frayé ;
Note : Jr. 18, 15 : Parce que, etc. ; protase, ou premier membre d’une période dont l’apodose, ou second membre, se trouve au verset suivant.
16 Afin que leur terre fût livrée à la désolation et à un sifflement éternel ; quiconque passera à travers cette terre, sera dans la stupeur et secouera sa tête.
Note : Jr. 18, 16 : Voir Jérémie, 19, 8 ; 49, 13 ; 50, 13. ― Sifflement. Siffler sur quelqu’un ou sur quelque chose, a toujours été une marque de dérision, de mépris. ― Quiconque, etc. , apodose. Voir le verset précédent. ― Secouera sa tête ; marque de mépris et d’insulte.
17 Comme un vent brûlant, je les disperserai devant l’ennemi; je leur tournerai le dos et non la face, au jour de leur perte.
18 Et ils ont dit : Venez, et formons contre Jérémie des desseins ; car la loi ne manquera pas au prêtre, ni le conseil au sage, ni la parole au prophète ; venez, blessons-le de notre langue, et n’ayons égard à aucun de ses discours.
19 Seigneur, portez votre attention sur moi et entendez la voix de mes adversaires. 20 Est-ce que pour le bien est rendu le mal, puisqu’ils ont creusé une fosse à mon âme? Souvenez-vous que je me suis tenu en votre présence, afin de parler en leur faveur, et afin de détourner votre imagination d’eux.
Note : Jr. 18, 20 : Mon âme ; hébraïsme, pour ma personne, moi. ― Ils ont creusé une fosse, comme on fait pour prendre les bêtes sauvages, en les y faisant tomber.
21 A cause de cela, livrez leurs fils à la faim, et conduisez-les aux mains du glaive ; que leurs femmes deviennent sans enfants et veuves; que leurs maris soient mis à mort; que les jeunes hommes soient percés par le glaive dans le combat. 22 Qu’un cri soit entendu de leurs maisons; car vous amènerez soudain sur eux un voleur, parce qu’ils ont creusé une fosse afin de me prendre, et qu’ils ont caché des lacs sous mes pieds. 23 Mais vous. Seigneur, vous connaissez tout leur dessein de mort contre moi ; ne soyez pas propice à leur iniquité, et que leur péché ne s’efface pas de votre face; qu’ils soient renversés en votre présence ; au temps de votre fureur consumez-les.