Chapitre 58
1 Crie et ne cesse point; comme la trompette élève ta voix, et annonce à mon peuple ses crimes, et à la maison de Jacob ses péchés.
Note : Is. 58, 1-14 : III. Troisième section : Le royaume messianique, du chapitre 58 au chapitre 66. ― 1er Discours. Du faux et du vrai culte dû à Dieu, chapitre 58. Le peuple prétend être pieux et mériter le salut, parce qu’il jeûne, mais à quoi sert le jeûne si la rénovation intérieure ne l’accompagne ? C’est une oeuvre extérieure sans valeur, parce qu’il n’est pas le fruit de la crainte de Dieu, versets 1 à 6. ― Il faut être charitable envers le prochain ; faire la volonté du Seigneur : voilà le vrai culte qu’on doit rendre à Dieu, afin de recevoir ses grâces et ses miséricordes, versets 7 à 14, voir Matthieu, 6, verset 1 et suivants.
Note : Is. 58, 1 : Crie. C’est le Seigneur qui s’adresse à Isaïe.
2 Car c’est moi que de jour en jour ils cherchent, et ils veulent connaître mes voies; comme une nation qui aurait pratiqué la justice et qui n’aurait pas abandonné le jugement de son Dieu ; ils me demandent des jugements de justice, et ils veulent s’approcher de Dieu.
Note : Is. 58, 2 : Le jugement de son Dieu ; c’est-à-dire la loi de son Dieu. ― Des jugements de justice ; la raison des jugements de ma justice. ― S’approcher de Dieu, pour entre en jugement, disputer avec lui.
3 Pourquoi, disent-ils, avons-nous jeûné, et n’avez-vous pas regardé? Pourquoi avons-nous humilié nos âmes, et ne l’avez-vous pas su? Voici qu’au jour de votre jeûne se trouve votre volonté, et que vous poursuivez vos débiteurs.
Note : Is. 58, 3 : Au jour, etc. les Juifs captifs à Babylone avaient institué d’eux-mêmes certains jeûnes, qu’ils continuèrent pendant quelques temps après la captivité. Ils consultèrent Zacharie, pour savoir s’ils devaient les continuer plus longtemps. Sans répondre directement à leur demande, le prophète leur fit le même reproche que nous lisons ici dans Isaïe. Voir Zacharie, 7, versets 2 et suivants.
4 Voici que vous jeûnez pour susciter des procès et des querelles, et que vous frappez du poing impitoyablement. Ne jugez pas comme jusqu’à ce jour, pour que vos cris retentissent dans l’air.
5 Est-ce que le jeûne que j’ai choisi est tel que pendant un jour un homme afflige son âme, contourne sa tête comme un cercle, et se couvre d’un sac et de cendre ? Est-ce là ce que tu appelleras un jeûne, et un jour agréable au Seigneur?
Note : Is. 58, 5 : Voir Zacharie, 7, 5.
6 Le jeûne que j’ai choisi n’est-il pas celui-ci? romps les liens de l’impiété, délie les faisceaux accablants, renvoie libres ceux qui sont opprimés, et brise tout fardeau.
Note : Is. 58, 6 : Les faisceaux ; tout ce qui gêne, pèse.
7 Romps ton pain pour celui qui a faim, et fais entrer dans ta maison les indigents et ceux qui errent sans asile; lorsque tu verras quelqu’un nu, couvre-le, et ne méprise point ta chair.
Note : Is. 58, 7 : Voir Ezéchiel, 18, vv. 7, 16 ; Matthieu, 25, 35. ― Ta chair ; tes frères, tes proches. Comparer à Genèse, 39, 14 ; 37, 27.
8 Alors ta lumière éclatera comme le matin, et bientôt la guérison se montrera; ta justice marchera devant ta face, et la gloire du Seigneur te recueillera.
Note : Is. 58, 8 : Ta lumière. La lumière désigne souvent, dans les auteurs sacrés, la joie et la félicité, surtout celles qui succèdent à un état de tristesse, d’humiliation et d’oppression qui est ordinairement exprimé par le mot ténèbres. ― Ta guérison. Les Hébreux appelaient maladie, toute sorte de maux, et guérison, la délivrance, la cessation de ces maux. ― La gloire du Seigneur te recueillera. Cette même idée a été déjà exprimée, quoiqu’en des termes différents. Voir Isaïe, 52, 12.
9 Alors tu invoqueras le Seigneur, et le Seigneur t’exaucera ; tu crieras, et il dira : Me voici ; si tu ôtes du milieu de toi la chaîne, et si tu cesses d’étendre le doigt et de dire ce qui n’est pas utile.
Note : Is. 58, 9 : La chaîne ; dont tu charges tes frères. ― D’étendre le doigt ; ou de montrer au doigt ; locution qui a toujours marqué le mépris et l’insulte. ― Ce qui n’est pas utile (quod non prodest) ; le terme hébreu correspondant signifie aussi méchanceté, iniquité, crime, mensonge, fausseté. De là le Chaldéen l’a rendu par rapine, et les Septante par murmure. Quoi qu’il en soit, il s’agit ici de paroles nuisibles au prochain.
10 Si tu prodigues ton âme à celui qui a faim, et si tu remplis de consolation une âme affligée, ta lumière se lèvera dans les ténèbres, et tes ténèbres seront comme le midi.
Note : Is. 58, 10 : Si tu prodigues, etc. ; c’est-à-dire, si tu assistes le pauvre affamé avec une grande effusion de coeur. ― Ta lumière, etc. Voir le verset 8.
11 Et le Seigneur te donnera le repos sans interruption, et il remplira ton âme de splendeurs ; il délivrera tes os, et tu seras comme un jardin arrosé, et comme une fontaine d’eau, à laquelle les eaux ne manqueront pas.
Note : Is. 58, 11 : Il délivrera (liberabit) ; ou bien il rendra libres, c’est-à-dire prompts, agiles, lestes, comme porte le texte hébreu. ― Os (ossa) ; peut s’entendre des membres du corps en général.
12 Et par toi seront remplis d’édifices des lieux déserts depuis des siècles ; tu relèveras des fondements abandonnés pendant plusieurs générations, et tu seras appelé constructeur des haies, mettant les sentiers en repos.
Note : Is. 58, 12 : Voir Isaïe, 61, 4. ― Plusieurs générations ; littéralement et par hébraïsme, génération et génération. ― Constructeurs de haies ; c’est sans doute une allusion à la restauration de Jérusalem qui est souvent appelée une vigne dont les murs sont des haies, ou bien aux haies réelles des vignes, détruites par les Chaldéens. ― Mettant, etc. ; rendant sûrs et sans aucun danger les chemins, auparavant infestés par les voleurs.
13 Si tu t’abstiens, à cause du sabbat, d’avancer ton pied et de faire ta volonté dans le -jour qui m’est consacré ; si tu appelles le sabbat délicieux, jour du Seigneur saint et glorieux; si tu le glorifies en ne suivant pas tes voies, et si tu ne mets pas ta volonté à dire des paroles vaines,
Note : Is. 58, 13 : Si tu t’abstiens, etc. ; littéralement, si tu détournes à cause du sabbat ton pied ; c’est-à-dire si tu ne voyages pas le jour du sabbat. Les Juifs croyaient qu’il ne leur était pas permis de faire plus de deux mille pas, c’est-à-dire environ une demi-lieue de chemin, le jour du sabbat. ― A cause ; c’est le vrai sens qu’a ici, comme dans bien d’autres passages, la particule hébraïque, rendue dans la Vulgate par a. ― De faire (facere) ta volonté ; second complément de si tu t’abstiens, ou si tu détournes (si averteris).
14 Alors tu trouveras des délices dans le Seigneur ; je t’élèverai sur les hauteurs de la terre, et je te nourrirai avec l’héritage de Jacob ton père, car la bouche du Seigneur a parlé.
Note : Is. 58, 14 : Les hauteurs de la terre ; c’est-à-dire le pays de tes pères, qui est une terre haute et élevée. Comparer à Deutéronome, 32, 13.