Chapitre 39
1 Est-ce que tu connais le temps de l’enfantement des chèvres sauvages dans les rochers? ou as-tu observé des biches lorsqu’elles enfantaient?
Note : Job 39, 1 : Dans l’original, le premier animal est nommé littéralement grimpeur de rochers, c’est-à-dire chèvre sauvage, bouquetin, sorte de chamois semblable à celui de la Suisse et des Alpes Tyroliennes, qui habite les endroits les plus escarpés.
2 As-tu compté les mois de leur conception, et sais-tu le temps de leur enfantement?
Note : Job 39, 2 : Les mois de leur conception ; c’est-à-dire les mois qui se sont écoulés depuis le moment où elles ont conçu leur fruit.
3 Elles se courbent pour mettre bas leur faon, et elles enfantent, et elles poussent des hurlements. 4 Leurs petits se séparent et vont au pâturage; ils sortent et ne reviennent pas vers elles.
5 Qui a laissé aller l’onagre libre, qui a rompu ses liens?
Note : Job 39, 5 : L’onagre. Cet animal est très célèbre en Orient à cause de la rapidité de sa course, et c’est de cette qualité qu’il paraît tirer son nom oriental. On assure qu’aucun cavalier ne peut l’atteindre. Les poètes orientaux comparent à un troupeau d’onagres un escadron de cavaliers qui passent avec la rapidité de l’éclair. C’est un animal très sauvage, d’un roux cendré, à longues oreilles, qui vit en troupes dans les déserts.
6 Je lui ai donné dans la solitude une maison, et ses lieux de retraite dans une terre de sel.
Note : Job 39, 6 : Une terre de sel ; c’est un terrain rempli de nitre, inculte, stérile.
7 Il méprise la multitude d’une ville, et il n’entend pas le cri d’un exacteur. 8 Il regarde de tous côtés les montagnes, lieux de son pâturage, et il cherche tous les herbages verts.
9 Est-ce qu’un rhinocéros voudra te servir, ou demeurera-t-il à ton étable?
Note : Job 39, 9 : Un rhinocéros. Dans l’original reem. Le nom de cet animal est diversement traduit. Les Septante l’ont rendu par licorne ; Aquila et la Vulgate par rhinocéros ; d’autres par oryx, espèce d’antilope ; Schultens, Gesenius, par buffle. Les questions qui se rapportent au reem, versets 9 à 12, et l’opposition qui est établie entre cet animal et le boeuf domestique prouvent qu’il s’agit du boeuf sauvage ou du buffle.
10 Est-ce que tu lieras un rhinocéros à tes traits, pour qu’il laboure? ou rompra-t-il les glèbes des vallons après toi?
Note : Job 39, 10 : A tes traits ; aux traits de ta charrue. ― Après toi ; en labourant, les animaux vont devant le labourant, et en hersant. ― Vallons ; c’est-à-dire sillons, comme ont traduit les Septante.
11 Est-ce que tu auras confiance en sa grande force, et lui laisseras-tu tes travaux ? 12 Est-ce que tu croiras qu’il te rendra tes semailles et qu’il remplira ton aire?
13 L’aile de l’autruche est semblable aux ailes du héron et de l’épervier.
Note : Job 39, 13 : Littéralement dans l’original : L’aile de l’autruche bat avec allégresse ; est-ce l’aile pieuse (de la cigogne qu’on appelle pieuse à cause de sa tendresse pour ses petits) ? Non ; est-ce l’aile prenant l’essor (ou l’aile de l’épervier) ? Non, car elle ne vole pas.
14 Quand elle abandonne ses oeufs sur la terre, sera-ce toi, par hasard, qui les réchaufferas dans la poussière?
Note : Job 39, 14 : Les naturalistes et les voyageurs rapportent sur ce point des choses contradictoires. Si l’autruche ne néglige pas entièrement ses oeufs, il paraît du moins certain qu’elle en prend peu de soin, surtout dans les jours qui suivent la ponte, et qu’elle les abandonne toujours quand elle est poursuivie par les chasseurs.
15 Elle oublie qu’un pied les foulera, ou que la bête des champs les écrasera.
Note : Job 39, 15 : L’autruche fait son nid dans un trou qu’elle creuse dans le sable. Les oeufs mal enterrés ou dispersés sont souvent la proie des chacals et des hyènes.
16 Elle est dure pour ses petits, comme s’ils n’étaient pas les siens, elle a rendu son travail inutile, en les abandonnant, aucune crainte ne l’y obligeant.
Note : Job 39, 16 : L’autruche travaille en vain, en pondant des oeufs, en les plaçant dans un nid, en les couvant même pour un temps, puisqu’après cela elle les abandonne sans y être forcée par aucun motif de crainte. Si quelquefois les autres oiseaux quittent leur nid, c’est ou parce que leurs oeufs ont été refroidis, ou qu’on a dérangé leur nid, ou qu’on les en a chassés et qu’on les a effarouchés. Mais l’autruche abandonne ses oeufs, sans y être obligée par aucune de ces raisons.
17 Car Dieu l’a privée de sagesse, et ne lui a pas donné l’intelligence.
Note : Job 39, 17 : On sait que l’autruche est un animal oublieux et stupide. C’est ainsi que la dépeignent les naturalistes. ― Plus sot qu’une autruche, dit un proverbe arabe.
18 Dans l’occasion, elle élève en haut ses ailes ; elle se rit du cheval et de celui qui le monte.
Note : Job 39, 18 : Elle se rit ; etc. Pline dit (liv. X, chap. I) que, lorsque l’autruche est poursuivie par les chasseurs, elle étend ses ailes dont elle s’aide, comme de voiles, pour courir, et qu’elle court ainsi avec une vitesse qui approche du vol le plus rapide. Diodore de Sicile ajoute (liv. II) qu’en courant elle lance des pierres avec ses pieds par derrière si violemment que souvent elle tue les chasseurs. ― Les naturalistes confirment ces détails. « La course des autruches est très rapide, dit l’un d’eux. Les lévriers les plus agiles ne peuvent les atteindre. L’Arabe lui-même, monté sur son cheval, est obligé de recourir à la ruse pour les prendre, en leur jetant adroitement un bâton dans les jambes. Dans leur fuite, elles lancent derrière elles des cailloux comme des traits contre ceux qui les poursuivent. »
19 Est-ce que tu donneras au cheval de la force, ou environneras-tu son cou de hennissements ?
Note : Job 39, 19 : Environneras-tu, etc. ; c’est-à-dire peux-tu donner au cheval le hennissement qu’il fait retentir autour de son cou ? ― Rollin dit de la description du cheval : « Chaque mot demanderait d’être développé, pour en faire sentir la beauté… Les armées sont longtemps à se mettre en ordre de bataille… Tous les mouvements sont marqués par des signaux particuliers. Cette lenteur importune le cheval. Comme il est prêt au premier son de trompette, il porte avec impatience qu’il faille avertir tant de fois l’armée. Il murmure en secret contre tous ces délais, et ne pouvant demeurer en place, ni aussi désobéir, il bat continuellement du pied et se plaint en sa manière qu’on perde inutilement le temps à se regarder sans rien faire. Dans son impatience, il compte pour rien tous les signaux qui ne sont pas décisifs et qui ne font marquer que quelque détail dont il n’est pas occupé. Mais quand c’est tout de bon, et que le dernier coup de trompette annonce la bataille, alors toute la contenance du cheval change. On dirait qu’il distingue, comme par l’odorat, que le combat va se donner, et qu’il a entendu distinctement l’ordre du général, et il répond aux cris confus de l’armée par un frissonnement qui marque son allégresse et son courage. Qu’on compare les admirables descriptions qu’Homère et Virgile ont faites du cheval, on verra combien celle-ci est supérieure. »
20 Est-ce que tu le feras bondir comme les sauterelles? La gloire de ses naseaux est la terreur.
Note : Job 39, 20 : La gloire de ses naseaux, etc. Le souffle si fier de ses narines répand la terreur. Un cheval, animé et échauffé, montre une certaine audace par le souffle de ses narines, qui inspire de la crainte à ceux qui le voient.
21 Il creuse de son sabot la terre, il s’élance avec audace ; il court au-devant des hommes armés ; 22 Il méprise la peur, il ne cède pas au glaive. 23 Sur lui retentira le bruit du carquois, la lance étincellera ainsi que le bouclier. 24 Bouillonnant et frémissant il dévore la terre, et ne tient aucun compte du bruit de la trompette, lorsqu’elle sonne le retour. 25 Dès qu’il entend le clairon, il dit : Oh ! il sent de loin une guerre, l’exhortation des chefs, et les cris confus d’une armée. 26 Est-ce par ta sagesse que l’épervier se couvre de ses plumes, étendant ses ailes vers le midi?
Note : Job 39, 26 : Etendant ses ailes vers le midi. Ce mot fait allusion à l’habitude qu’a d’émigrer l’oiseau dont il est question, le net. Le sens de ce mot n’est pas certain, mais il désigne incontestablement un oiseau de passage.
27 Est-ce à ton ordre que l’aigle s’élèvera, et placera son nid dans les lieux les plus élevés? 28 C’est dans des pierres qu’il demeure, et c’est sur des rocs escarpés et des rochers inaccessibles qu’il fait son séjour. 29 De là il contemple sa proie, et ses yeux voient de loin. 30 Ses petits lécheront le sang, et partout où est un cadavre, soudain il est présent.
Note : Job 39, 30 : Partout où est un cadavre. L’aigle ordinaire ne se nourrit pas de cadavres, mais il en existe une espèce qui les dévore volontiers. De plus, tous les aigles mangent les corps morts, avant qu’ils aient commencé à se corrompre.
31 Et le Seigneur continua à parler à Job :32 Est-ce que celui qui dispute avec Dieu se réduit si facilement au silence? Certainement celui qui reprend Dieu doit lui répondre. 33 Répondant alors au Seigneur, Job dit :34 Moi qui a parlé légèrement, que peux-je répondre? Je mettrai ma main sur ma bouche. 35 J’ai dit une chose (plut à Dieu que je ne l’eusse pas dite !) et une autre ; je n’y ajouterai rien de plus.